dimanche 14 mars 2010

Hé la France ! ton agriculture fout le camp !

MAIS QUE DEVIENT DONC L’ORDRE ÉTERNEL DES CHAMPS ?


Face à un crise économique sans précédent, et dont on voit mal comment en sortir à moins de bouleversement profonds dans la conception de nos modèles économiques, le Président de la République présentait l’autre soir un plan de sauvetage sans que soit prononcé une seule fois le mot agriculture !

Personne ne s’en est ému, tout le monde a retenu que le secteur automobile, qui lui n’a jamais produit de nourriture, va être fortement aidé parce qu’il emploie dix pour cent de la population active !

Promenez vous un samedi matin sur un marché du Sud-ouest de la France, celui de BERGERAC par exemple, vous y rencontrerez maints petits agriculteurs de la campagne avoisinante qui viennent vendre leur production pour essayer de survivre.Discutez avec eux, le moral n’y est pas, c’est le moins que l’on puisse dire, il y a chez eux plus de fatalisme que d’animosité face à la situation dramatique du secteur agricole non seulement dans cette région mais dans la France entière.
Au lendemain de l’intervention du Président de la République ils sont particulièrement angoissés :

« La descente aux enfers se poursuit murmure l’un d’eux ! ».

« Les seuls emplois qui vont subsister en agriculture dit un autre sont ceux des contrôleurs qui vérifient que nous ne produisons plus ! ».

« Nous sommes de plus en plus soumis à des contrôles, payants, par des hordes d’incapables plus nombreux que les agriculteurs dit cette femme producteur de bio pour partie, il en est venu un cette semaine vérifier en plein hiver que je faisais bien du bio, je l’ai revu le lendemain tournant autour de mes arbres et ne sachant que répondre à ma question : mais que cherchez vous ?
Mes kiwis ne sont plus à la norme européenne je vais devoir refaire une plantation qui entrait en pleine production, sans aide ni indemnisation. Ou alors je les vendrai en cachette !».

« Tout est vérifié, mais en plus il faut payer la vérification : la taille des pommes, elles ne doivent pas dépasser 45 mm au risque de contravention, les plus petites, les meilleures sont vendues sous le manteau alors que nous sommes presque au siècle du cannabis en vente libre !

Le poids des produits conditionnés est contrôlé, sanction normale s’il n’y a que 240 g pour 250 annoncés, mais sanction aussi s’il y en a 255 au prétexte sans doute que si la balance se trompe en plus, elle peut aussi se tromper en moins !

Les locaux de stockage des produits doivent être repeints tous les ans avec des peintures alimentaires.Les pulvérisateurs, dernière trouvaille, doivent être contrôlés régulièrement moyennant finance.

Nous en sommes au point où nous devrons porter des vêtements de travail homologués dans toutes nos activités, des gants pour servir les clients au marché et sans doute des masques sur le visage ! ».

On se plaisait dans les années 60 à considérer le département de la Dordogne comme essentiellement rural, il était fréquent d’en faire une évaluation rapide de diverses statistiques économiques en divisant les chiffres nationaux par 100, c’était le département moyen. Il faisait relativement bon y vivre, il y avait bien entendu des problèmes comme ailleurs, mais l’activité agricole s’exerçait dans une semi autarcie qui voulait qu’avant de songer à importer ou exporter on saturât les marchés locaux par les productions locales.
La coopération agricole était certes sur le déclin, sans doute avait-elle parfaitement rempli son rôle depuis le début du siècle, mais elle survivait aidée en cela par ce profond respect d’un de ses principes essentiels : celui dit de proximité qui permettait à l’entraide et à la solidarité de jouer à plein tant que l’on restait dans des structures à taille humaine, des cercles d’intimité, bien vite disparus avec le sinistre Sico MASNHOLT, nouvel Attila, et sa mise en place de la non moins sinistre Politique Agricole Commune, aidé dans son œuvre destructrice par une mondialisation que l’on a voulue instantanée et par les règles conséquentes de, l’Organisation du Commerce Mondial.

Il y avait à cette époque quelques 60 000 exploitations agricoles en Dordogne, ce qui pour une population totale de 375 000 habitant devait représenter la moitié de celle-ci.
C’est dire si l’on ajoute les activités d’amont et d’aval liées à l’agriculture que cette dernière représentait la quasi-totalité de l’activité économique du département.

Les derniers chiffres cités font état en Dordogne en 2008 d’un peu plus de 8 000 exploitations, il suffit de parcourir les petites routes du département bien peu encombrées et de traverser des zones tombées au dessous de 1 habitant au km² pour vérifier que la campagne riante propre agréable, et soigneusement cultivée à fait place aux friches et jachères européennes subventionnées pour parachever la mort de l’agriculture.

Les traces de la tempête de 1999, restent visibles tant les arbres déracinés sont resté en place et pourrissent dans une forêt dont plus personne ne prend soin. Les prairies sont laissées à l’abandon , les pauvres vaches qui ne sont pas encore hermétiquement fermées sont particulièrement tristes, et maints agriculteurs se plaignaient il y a peu de devoir déverser des milliers de litres de lait dans les fossés pour satisfaire aux quotas édictés par la politique européenne ou l’organisation mondiale du commerce !

Les bâtiments agricoles souvent de grosses fermes admirables ont été dissociés des exploitations pour être livrés à une clientèle anglaise, riche à l’époque mais qui dans la crise actuelle tente de revendre à bas prix, les villages sont désertés et la plupart des maisons les plus belles « for sale » !

En Sarladais l’énoisage était une activité permettant à la veillée d’apporter un revenu supplémentaire aux agriculteurs et aux retraités les plus pauvres. Désormais les noix sont bien produites en Périgord, mais les cerneaux ne sont débarrassés de leur coque qu’en Moldavie, on ne dit rien de la qualité qui en résulte ni de l’incidence des transports sur le coût et sur un environnement que l’on prétend défendre !

Maints dossiers de demande de subventions de l’Union Européenne étaient il y a quelques mois rejetés systématiquement comme étant inéligibles… enquête faite on constatait que ces dossiers étaient instruits informatiquement au Pakistan par une société de ce pays, pas dans la langue vernaculaire du Périgord mais dans un mélange de pidgin, et de Globish ! Mais enfin ! tout le monde sait bien que les Pakistanais sont les seuls au monde à connaître les secrets de l’agriculture du Périgord ainsi que les meilleures recettes pour lui apporter une aide !

Dans toutes les manifestations de la grande mascarade du développement dit durable, notamment lors du Grenelle de l’environnement où à Bali on a découvert l’imbécillité suprême consistant à considérer la cession des droits d’émissions de gaz à effet de serre comme une activité économique au même titre que les productions agricole ou industrielle, maintes entreprise d’ailleurs ont régulièrement équilibré leurs comptes par ce moyen qui relève sans discussion possible de l’économie virtuelle tout comme les opérations financières sophistiquées qui ont conduit à la crise actuelle.
Eh bien il y a, toujours en Dordogne mais le cas n’est pas unique, une situation où il existait un moyen de réaliser une captation de gaz à effet de serre dans les conditions normales de l’économie réelle.
Les tenants du développement dit durable entendent en effet des bovins contrôler les pets et en régenter les rots au motif qu’ils émettent du méthane plus nocif que le CO², ce qui au passage doit être confirmé. Une solution élégante et rentable consiste à capter les gaz de fumier et à les transformer en combustible. Ceci existe depuis plus de 70 ans avec le « digesteur » mis au point à L’Institut Agricole d’Algérie par les professeurs DUCELLIER et ISMAN et qui a parfaitement fonctionné sur de petites et moyennes exploitations notamment dans le nord de la France en Belgique ou en Hollande.

Les demandes formulée en Périgord, pour obtenir au moins un financement et si possible une subvention, sont rejetées systématiquement dans la mesure où elles ne concernent qu’une exploitation et ne s’appliquent pas à des unités pouvant traiter plusieurs communes, voire un canton et pourquoi pas le département !

Le drame profond que vit ce département moyen est hélas celui de la France entière. On aurait pu penser que la disparition de notre agriculture, celle qui n’est pas industrialisée, bien que soigneusement programmée dans le cadre de l’économie virtuelle dans laquelle nous avons vécu ces dernières années et où la création monétaire très artificielle se faisait non pas à partir des productions, agricoles en priorité, et industrielles, mais surtout à partir des activités de l’inutile et du superflus, que cette disparition constituearit un signal d'alarme et que des solutions searaient apportées en conséquence.

La crise économique venue du monde anglo-saxon et résultant directement de cette aberration économique aurait du normalement nous conduire au travers des solutions recherchées à revenir dans le cadre de l’économie réelle où selon le principe de base de la création monétaire : « Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front » une indispensable hiérarchie est respectée dans la priorité des productions : l’alimentaire, le logement, la santé l’éducation, le reste venant après.
On comprend d’ailleurs à la lumière de cette crise et de ses causes à quel point nous avons fait fausse route dans les tentatives d’aide au développement des pays du sud, en essayant de mettre en place chez eux notre modèle économique qui a fait illusion jusqu’à ce que nous débouchions sur la crise, mais qui ne pouvait pas démarrer chez eux puisqu’il ne sait plus assurer la production, de l’indispensable prioritaire : la nourriture dont ces populations ont besoin avant toutes choses.
Nous avons englouti énergie et sommes énormes, notamment au travers du sinistre « Ajustement structurel » préconisé par la Banque Mondiale, pour développer dans ces pays une économie virtuelle devant leur permettre de dégager des devises pour nous acheter la nourriture de base que nous ne produisons plus nous-mêmes ! Et bien non ! Nous n’avons pas su tirer les leçons de la crise pour essayer d’en sortir en faisant des choix de solutions qui ne satisferont personne et qui n’apporteront rien.

Nous ne savons que dire : « Il faut relancer la consommation », or une économie qui ne produit pas ne peut pas consommer, c’est une évidence mais, et c’est sans doute plus subtil et cela que cela nous échappe, une économie qui néglige les productions prioritaires pour ne s’attacher qu’au secondaire, à l’inutile ou au superflus sape ses fondations pour ne construire que des superstructures qui finiront pas s’effondrer.

Nous sommes rentrés dans le cycle infernal d’une mondialisation aux règles de laquelle il faudrait que nous, nous soumettions tous instantanément quelle que soit notre situation économique. Ceci veut dire que l’économie mondiale est condamnée à disparaître dans la mesure où nous produirons tous des automobiles employant une forte part de la population active, alors que la production de nourriture se fera par d’énormes exploitations automatisées dont le but essentiel sera la rémunération du capital des actionnaires.

On est effaré à l’écoute de ces économistes qui clament haut et fort : « le protectionnisme c’est la guerre » ! Mais le risque de guerre ne vient-il pas du fait que nous dépendons de plus en plus des quelques pays étrangers, souvent lointains, produisant à bas prix de la mauvaise qualité et engendrant par les transports – qui participent à l’émission de gaz à effet de serre- des coûts auxquels vont venir s’ajouter ceux des emballages de la distribution et de la publicité ?
Si ce n’est pas une guerre ce sera une révolution d’affamés vivant dans une misère dorée où ils ne peuvent pas consommer leurs voitures ! Une règle bien simple pourrait consister en la saturation des marchés locaux par les productions locales avant d’exporter ce qu’il y a en trop et d’importer ce qui manque, ceci étant valable à l’intérieur d’un même pays, les prix de base agricole étant fixés non pas par les bourses mondiales, mais en calculant leur prix de revient de production majoré d’une marge permettant au producteur de base de vivre dignement. Il semble bien qu’un tel retour soit impossible à envisager, les mesures minimales de protectionnisme que cela entraînerait étant en contradiction absolue avec celles qui régissent la Tour de Babel de la mondialisation, et dont on sait maintenant qu’elles ne peuvent conduire qu’à :

- soit l’économie virtuelle dont nous commençons à peine à mesurer les dégâts

- soit à la gestion de structures qui n’étant plus à taille humaine échappent à tout contrôle sérieux. On ne saurait mettre tous ses œufs dans le même panier- même en surveillant le panier il est trop gros. On ne saurait non plus gérer raisonnablement un empire sur lequel le soleil ne se couche jamais !

Dans les deux cas nous, surtout les cultures les plus avancées, courrons à la catastrophe.
Les âneries du développement dit durable vont hélas se poursuivre : on va faire du bénéfice - du vent- sur les droits d’émission de CO² -pourquoi pas demain sur nos moindres flatulences ?- On va nous forcer à devenir végétariens au motif que la production de viande bovine entraîne pets et rots de ces derniers, sans se rendre compte de cette évidence que la production de toute matière organique, dont la viande, par le biais de la photosynthèse, recycle infiniment plus de CO² qu’elle n’en émet, en participant en outre à l’économie réelle et à elle seule ; alors que les activités relevant de la cession de droits d’émission - notamment la production d’automobiles que l’on renouvelle de plus en plus fréquemment, et bien avant quelles ne soient amorties, pour le seul plaisir de relancer une consommation imbécile- ne participent en grande partie qu’à une économie virtuelle.

Il eût été infiniment plus sain et plus raisonnable en redonnant à l’Agriculture son rôle de secteur primaire –au sens noble du mot- de ne prendre en considération et prioritairement à toutes choses que le maintien de « L’ordre éternel des champs » !

Bergerac le 12 janvier 2009
Jean-Pierre CANOT Agronome, banquier retraité, consultant expert crédit rural . Auteur de « Apprends-nous plutôt à pêcher ! “


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